Portraits déconfinés (2/16)
La formation en pleine adaptation

Le confinement, temps d’adaptation
Avec l’annonce du confinement, les organismes de formation ont dû stopper leurs activités. Les formations en présentiel ont été reportées ou annulées. « L’impact du confinement a été important, puisqu’il est compliqué de faire des formations artistiques à distance, notamment sur la pratique et la technique instrumentales, les cours d’harmonie, de composition, d’arrangement… » reconnaît Wilfrid Lebrec, responsable du secteur formation à Trempolino. Pour beaucoup, comme ARTES, le repos confiné a été de courte durée. Cyrille Bureau, à la tête de cet organisme de formations administratives et culturelles basé à Nantes, en a mesuré la charge : « Le plan de digitalisation de nos formations était à l’horizon d’un an et demi ; avec la crise, on a fait un boulot d’un an et demi en un mois et demi ! (…) On a revu tout le calendrier et tout le catalogue de formations. » La question de la formation à distance a aussi occupé Wilfrid Lebrec qui, à défaut d’enseignements artistiques, a ajusté ses formations administratives. « Il a fallu faire tout un travail en amont avec les intervenants sur la transformation des interventions. (…) C’est tout ce changement qui a été compliqué. » Chacun l’admet, pendant cette période, il a fallu faire preuve d’agilité et de réactivité pour adapter les plans de formation et répondre aux besoins. Depuis le mois de mars, Caroline Thibault-Druelle, directrice de l’association Musique et Danse en Loire-Atlantique, estime quant à elle avoir été « accaparée par des temps de consultation » et avoir, à ce titre, « activé la facette “ressource” de l’agence départementale en proposant des liens informatifs aux acteurs des enseignements artistiques. »
Une reprise impactée
Si l’activité a été suspendue pendant le confinement, la situation n’est pas sans conséquences financières. Chez ARTES, cet arrêt soudain s’est soldé par une perte de plus de 25% de son chiffre d’affaire annuel. A la Fédération des Radios Associatives des Pays de la Loire, le volume de formation est moindre (ndlr : la formation n’étant pas l’activité principale de la structure), mais l’impact financier non négligeable : « On va avoir une grosse perte sur l’activité formation car c’est une activité gagnante chez nous avec la venue de radios d’autres régions et des départements limitrophes » explique Valentin Beauvallet, directeur de la FRAP. L’association Musique et Danse en Loire-Atlantique, dont le volet formation est en décélération, a purement et simplement annulé son offre de formation entre mars et juin : « Etant subventionnés, l’obligation de faire du bénéfice n’est pas aussi forte que dans le secteur privé » confie la directrice. Néanmoins, le déconfinement a aussi sonné la reprise des activités, et de manière accrue. « On est débordé d’appels et de demandes » raconte Cyrille Bureau. Une conséquence de l’inactivité des salariés selon le directeur d’ARTES, mais aussi du renforcement de l’aide à la formation du Fonds National de l’Emploi, mis en place pour financer la formation des salariés en activité partielle. Cette « bouée de sauvetage » permet à l’entreprise de « limiter la casse », avec un mois de juin record en prévision. « Mais combien de temps ces aides vont-elles durer ? » questionne l’entrepreneur. Wilfrid Lebrec de Trempolino reçoit lui aussi beaucoup de requêtes, mais sans lien avec le FNE : « 90 % de notre public sont des artistes musiciens qui n’ont donc plus d’activité liée à la scène. Les intermittents nous sollicitent pour utiliser ce temps disponible pour se former. »
Un avenir incertain
Les organismes de formation sont actuellement dans la bourrasque et beaucoup d’incertitudes demeurent pour la suite. « On avait travaillé sur un plan de formation et de rencontres qui va sans doute être bousculé car les thématiques seront peut-être moins prioritaires pour les publics à la rentrée » admet Caroline Thibault-Druelle. La surcharge de travail des salariés et intermittents liée à la reprise d’activité fait aussi craindre un fort ralentissement pour le secteur de la formation. « Il y a un risque que certaines entreprises ne laissent plus le temps à leurs salariés de se former » regrette Valentin Beauvallet. « Ça a déjà été le cas avec la suppression des emplois aidés, la charge de travail ayant été plus élevée, la priorité n’a pas été donné à la formation. Cela va donc amplifier ce phénomène » appuie Cyrille Bureau. La projection reste difficile, mais une chose est sûre, d’aucun n’est prêt à abandonner la formation en chair et en os. « J’ai un regard très sceptique sur l’efficacité des formations en distanciel. Tout n’est pas transposable » explique Cyrille Bureau, rejoint par Wilfrid Lebrec : « J’espère que cette crise ne va pas nous obliger à aller vers le tout distanciel car c’est une modalité pédagogique qui déshumanise les choses et dans nos filières artistiques, c’est quasiment impossible. » Dans cet amas d’interrogations, tous s’inquiètent plus globalement sur l’avenir de la filière artistique et culturelle. Cependant, l’optimisme reste de mise, selon Caroline Thibault-Druelle : « Malgré que les acteurs aillent mal, on a la chance d’être sur un territoire relativement soutenu politiquement. On est vite solidaires, on se met vite en réseau et cette force du collectif nous fait avancer. »
article écrit par le Scéno
photo : Salle de Formation Artes - juin 2020
le FNE - Formation : Dans le cadre de la crise du COVID-19, le dispositif FNE-Formation est renforcé de manière temporaire afin de répondre aux besoins des entreprises en activité partielle par la prise en charge des coûts pédagogiques. Il est accessible à toutes les entreprises qui ont des salariés en chômage partiel, par une simple convention signée entre l’entreprise et la Direccte. en savoir plus